Les statuts sociaux sont souvent injustes lorsqu'on regarde les pauvres et les riches. Les gens ayant une bonne fortune sont souvent hautains, le menton relevé et regardant les gens de haut. Les pauvres, quant à eux, sont souvent altruistes, car ils savent ce qu'est la misère, ce que cela fait de n'avoir rien et de survivre à ce monde. L'écart est trop grand pour permettre une bonne cohabitation entre les deux. Aujourd'hui, le chariot du Maître s'arrêtait près d'une auberge que l'esclave connaissait bien. Elle était simplement assise, les pattes contre elle-même. Shayanne s'était transformée en chat domestique à la demande de son Maître lorsqu'ils avaient quitté la ville voisine. Elle ne pouvait pas discuter ses ordres alors elle s'était docilement transformée pour ensuite être enchaînée pour éviter sa fuite. Cette forme animale permettait à son supérieur d'être en pleine possession de qui elle était et de pouvoir la surveiller près, mais cela avait également la faculté d'éviter d'éveiller les soupçons l'entourant et de passer sous la supervision d'autrui. Le Maître lui permit de retrouver forme humaine lorsqu'il avait terminé de payer ses nuits dans cette auberge. La jeune femme fut libérée de ses liens et elle sauta agilement sur le sol. Tranquillement, elle retrouvait forme humaine et elle récupéra ses vêtements afin de s'habiller. Sans un mot de plus, l'homme regagna l'intérieur où il allait certainement oublier ses misères dans l'alcool, liquide diabolique. La jeune femme le regarda disparaître en serrant les doigts contre ses paumes, formant ainsi deux poings. Elle s'était tout de suite adoucie lorsqu'elle l'avait vu disparaître derrière les portes. Son regard se porta alors un peu à l'opposé. Elle remarqua bien vite l'activité des gens, autant les fermiers, les femmes, quelques marchands.
Prenant une grande inspiration, la demoiselle se mit à marcher en direction de ces gens. Elle n'avait que quelques pièces à peine dans les plis de sa robe. C'est tout ce que son Maître lui donnait afin d'éviter que son "objet" ne tombe malade ou pire, "qu'il" meurt. Shayanne lui rapportait trop pour qu'il prenne un tel risque. Néanmoins, il n'était pas assez attentionné pour veiller à ce qu'elle mange à sa faim. L'esclave demeurait alors chétive, trop mince même pour plusieurs personnes. Elle ne se plaignait jamais à personne de sa situation, car elle doutait que quelqu'un puisse vraiment faire quelque chose pour elle. La jeune femme était sous l'emprise de cet homme depuis trop longtemps. Sa vie d'esclave avait débuté avant lui. Elle avait été ravie à ses parents très tôt dans sa vie, mais le pire était qu'elle se souvenait encore de la mort de sa mère. On l'avait tué devant ses yeux avant qu'elle ne se fasse enlever. Les Sholiens étaient recherchés par ces hommes à cause de leurs talents naturels pour la magie. Ils espéraient donc pouvoir trouver quelques perles rares. Au début, le Maître de Shayanne croyait qu'elle était bonne à rien, mais lorsque son pouvoir de psychométrie s'est réveillé, il a changé d'avis. Néanmoins, il restait mécontent que celui-ci ne puisse pas se déclencher lorsque sa propriétaire le désir. C'était à chaque fois jouer à la roulette russe autrement dit.
La jeune femme continua son chemin jusqu'à arriver près des fermes. Ses yeux tombaient sur certaines personnes, surtout des hommes avec leur faux en train de récolter leur plantation. Ne voulant pas les déranger, Shayanne continua de marcher encore une dizaine de minutes avant de s'arrêter. Elle venait d'entendre un drôle de son. Doucement, elle laissa son ouïe prendre le devant sur ses yeux et ses pas se dirigeaient vers un buisson de taille moyenne. Calmement, elle s'accroupit et ouvrit le feuillage. Elle fut surprise de constater la présence d'un petit animal à fourrure moyenne. La demoiselle le prit dans ses bras sans grande résistance de sa part. Curieuse, elle le regarda doucement jusqu'à ce que son regard devienne plus soucieux. Dépendant d'où elle mettait les mains, le pauvre petit chat émettait des sons plaintifs. Elle regarda ses doigts suite à une drôle d'impression au toucher. Son coeur manqua un battement. Il y avait bien du sang sur ses doigts! Malheureusement, Shayanne ne possédait aucun pouvoir de guérison. La panique commença légèrement à la gagner et elle se dirigea tout de suite avec le pauvre animal en direction des marchands. D'une voix douce, mais assez claire pour qu'on puisse l'entendre, la jeune femme se mit à répéter plusieurs fois : " - S'il vous plaît! est-ce que quelqu'un est un magicien? ce chat a besoin de soins! " Quelques regards furent glissés sur elle, mais personne n'était venu vers elle avec une réponse positive. Elle ne se découragea guère face à ce silence et continua de clamer la même phrase plusieurs fois avec l'espoir que quelqu'un lui réponde.